La Vague

par | Août 23, 2019 | Politique internationale

En cet été 2019, combien de fois a-t-on appris que des bateaux humanitaires se voyaient refuser l’entrée dans les ports européens de Méditerranée? Surchargés, ayant récupéré à leur bord des migrants qui ont fui la Lybie dans de fragiles canots, ils attendent des jours avant que, sous la pression de l’opinon publique, un gouvernement leur accorde du bout des lèvres le droit d’accoster. Ou avant qu’une capitaine courageuse ose défier les lois: le 26 juin, Carola Rackete, capitaine du Sea-Watch, débarquait 42 malheureux à Lampedusa, malgré l’interdiction des autorités. Respect.
En première ligne vu sa proximité avec les côtes lybiennes, l’Italie est régulièrement montrée du doigt: il est honteux, pour un pays « civilisé », de refuser de porter secours à des humains en péril.

Bien sûr.

Mais la honte éclabousse également tous les pays dont Rome attend à juste titre – la solidarité.
Que je sache, notre Conseil fédéral ne s’est pas annoncé pour accueillir sa part de ces réfugiés.

Il y a peu, l’indignation m’a poussé à écrire une chanson. Voici les paroles:

C’est une longue vague ample lente profonde
Qui vient battre nos côtes et meurt sur les galets

Elle arrive de loin entendez-la qui gronde

Quelle force pourrait arrêter la marée?

Entassés sur le pont étouffant dans les cales

De vieux rafiots rouillés qu’un rien fera sombrer

C’est une foule immense d’humains tremblants et pâles

Qui s’offrent à la mort pour tenter d’exister


Ils s’appellent Ibrahim Rachid Macodou

Elles c’est Djamila la belle ou Fatima,

Elles ont contre leur sein des enfants aux yeux doux

Des enfants juste nés qui ne comprennent pas

Eux bras dressés supplient le ciel noir et cruel

Leur bouche n’est qu’un cri où résonne l’effroi

La houle les secoue les gouffres les appellent

Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas


Nous ne pourrons pas dire que nous n’avons pas vu

Les villages rasés et les vieilles en larmes

Les yeux hallucinés les haillons les pieds nus

Avec dans le lointain le grondement des armes

Voilà ce qu’ils ont fui par dunes et pierrailles

Pour d’autres c’est la faim qu’en savons-nous ici?

La faim sorcière noire où faut-il donc qu’ils aillent?

Ce n’est pas coeur léger qu’on engage sa vie


Et nous voyant venir cette pure souffrance

Nous laissons aboyer les bâtisseurs de haine

Les bâtisseurs de murs aux vieilles idées rances

Qui sentent la charogne et les brumes anciennes

Et nous baissons les yeux coeurs et portes fermés

Que dira-t-on de nous dans cent ans dans vingt ans?

Eux suivent leur chimère acharnés harassés

Et la nuit descend sur un monde indifférent


Michel Bühle
r

(article paru dans Le Courrier le 23/08/2019)

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